Textes de Patrick

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19/04

Importance de la notion de mondialité chez Glissant pour prendre en compte la dimension planétaire ( et pas seulement internationale des enjeux) et ne pas la confondre avec la forme de " mondialisation" ou de globalisation du capitalisme. La pandémie actuelle illustre bien cet Enjeu : d'un côté la mondialisation sous la forme de la globalisation du capitalisme financier est insoutenable sur les plans écologique, social et démocratique ( elle conduit partout à des logiques autoritaires sous les formes diverses à la Trump ou à la Xi Jin Ping et toutes leurs variantes mondiales ). D'un autre côté les replis identitaires qu'ils soient nationalistes ou religieux sont également insoutenables et dangereux.

Il nous faut donc penser, comme Glissant, une capacité de prendre en compte à la fois :
1) l'enjeu planétaire et mondial, celui de la citoyenneté planétaire et du devenir de l'humanité (en alliance et non en opposition avec le Vivant)
2) tout en laissant leur place aux "identités racines" des peuples ( et pas seulement les États Nations) et des cultures.

C'est l'intérêt de l'approche "archipelique" qui suppose que le commun planétaire ainsi coconstruit ne soit la propriété de personne. Il n'y a Pas en effet de gouvernance mondiale acceptable sous forme impériale , que cet impérialisme soit economique ( version du capitalisme en particulier américain ) ou Politique ( version proposée par le despotisme en particulier chinois).
  • C'est un enjeu déjà très concret puisque cela suppose d'organiser une résistance citoyenne planétaire contre la privatisation des océans, des pôles et de l'espace qui restent heureusement pour l'essentiel des (biens) Communs de l'humanité mais qui sont de plus en plus convoités par les multinationales et les États.

Il faut par ailleurs face aux replis nationalistes ou religieux Inventer un bon usage des identités racines des peuples et des cultures. Le glissement de la charte des Nations Unies qui a transformé de fait la première phrase "We the people", "nous les peuples" en "nous les États" avec le droit de ces derniers à capter la parole de leurs peuples est la aussi significatif de la nécessité d'un double Mouvement archipelique : respecter les identités racines mais à condition qu'elles ne s'opposent pas à un commun à coconstruire et qu'elles entrent en relation avec d'autres identités racines au lieu de se fermer. C'est Tout l'enjeu des convergences et de ce que E Glissant nommé aussi, à partir de sa propre culture antillaise, " la créolisation" possible de l'humanité.

Une bataille mondiale contre les logiques de Guerre


Il s'agit la d'une nouvelle forme de bataille mondiale mais qui, à la différence des guerres, n'oppose pas des États entre eux mais vise à faire réussir des logique de vie face à des logiques mortifères . C'est Tout l'enjeu d'Eros face à Thanatos et de la capacité de l'humanité à construire un anthropocene positif et non destructeur comme aujourd'hui. On peut le résumer ainsi : comment Notre espèce pourrait elle devenir pour de Bon Sapiens Sapiens c'est à dire capable d'allier l'intelligence connectée et solidaire ( avec le meilleur usage possible des outils d'information et de communication) avec une capacité à progresser dans l'ordre de la sagesse, donc de l'Intelligence du coeur.

L'enjeu du bien vivre en acte


Cet Enjeu se situe autant à l'échelle ds transformations globales et structurelles qu'à celles des transformations personnelles ou celles de nos organisations. Ce que le forum social mondial de Porto Alegre a appelé l'axe TPTS- Transformation personnelle et Transformation sociale- auquel on peut ajouter celui du TC de la transformation collective des organisions qui sont convaincues de la nécessité d'un tel Projet mais doivent se transformer elles pour être à la fois cohérentes et convaincantes avec ce qu'elles proposent. C'est la fameuse phrase de Gandhi : soyons le changement que nous proposons. C'est Tout l'enjeu du bien vivre en acte d'autant plus important que nous sommes entrés dans des Temps sombres ou l'alternative entre guerres et Paix entre logique de rivalité et logiques de solidarite , entre polarisation régressive et polarisation créative , traversera les individus, les organsisations, les États, les entreprises, les religions et appellera d'autant plus des qualités de discernement et d'évaluation démocratique (au sens de délibération sur ce qui fait valeur).

On peut commencer d'appliquer ce type d'approche à des questions très actuelles telles le problème des Politiques de sante mondiales initiées par la charte d'Ottatwa et d'autant plus importantes à coconstruire que nous vivons une crise majeure de l'actuelle OMS, l'organisation mondiale de la sante fragilisée à la fois par le retrait irresponsable de Trump et les pressions chinoises en son sein .
C'est la même chose pour l'enjeu des nouvelles politiques économiques et financières qui doivent repartir des richesses réelles à préserver et démultiplier telles les biens ecologiques de base à protéger de l'empoisonnement ( air, eau, terre) et les biens anthropologiques fondamentaux qui permettent aux humains de Vivre en Paix en donnant sens à leur vie. C'est Tout l'enjeu des nouveaux indicateurs de richesse ( cf la commission internationale présidée par Joseph Stiglitz et Amartya Sen) mais aussi d'une articulation des systemes d'échange et de monnaies citoyennes fondées sur ces richesses réelles depuis le niveau local (monnaies citoyennes, accorderies, Sel ou Lets, réseaux d'échange de savoirs..) jusqu'au niveau mondial : cf le Projet de monnaie commune planétaire , la Terra, imaginée par Bernard Lietaer au service d'un développement réellement soutenable...

Autres développements à venir possibles dans la note sur l'intérêt de l'approche archipelique dans les domaines politiques, culturels et spirituels


22/03


Sur le fond de l'approche Archipel je crois que l'on saute régulièrement une étape essentielle et que nous l'avons aussi en partie sautée au sein des Jours heureux : si l'on ne prend pas le Temps d'une ecoute empathique de l'identité racine des uns et des autres en tension dynamique avec le Projet commun ( l'océan ou le lagon n'appartenant à personne) celle ci finit toujours par réapparaître de manière régressive. Ce peut être à travers les egos d'organisations et pas seulement de Personnes et c'est lié à un élément fondamental qui est le rapport entre le désir de reconnaissance et le désir de sens. Si l'on ne comprend pas en profondeur l'histoire, la culture, l'identité racine de l'autre -qu'il soit une personne ou une collectivité- il aura l'impression que ce qui le constitue et fait sens pour lui n'est pas véritablement pris en compte. Et il ne suffit pas d'un tour de table et de règles de bienveillance pour ce Faire.
Sur le plan Politique c'est encore plus vrai qu'ailleurs car le cynisme -qui est aussi un désespoir- constitue la menace la plus forte qui pèse sur les individus comme sur les organisations car le propre de l'aspiration au Pouvoir -au sens classique du terme - est de devoir se colleter avec "le risque moral" , c'est à dire le fait que ni les peuples, ni les sociétés ne sont véritablement conformes au "bien" que l'on projette quand on est dans l'opposition. Du coup la corde de rappel face à ce "risque moral" c'est le socle de croyances qui a la fois fait sens et est source de reconnaissance. Si l'on ne l'a pas pris en compte, si on n'a pas analysé son rapport au commun projeté ( mais aussi du coup ce qui lui fait obstacle) on est passé à côté de l'essentiel : on pourra toujours se lamenter des égos d'organisation ou de Personnes, ils ont en réalité un fondement anthropologique majeur ( Voir aussi sur ce point le manifeste convivialiste). Trop souvent en gommant ce maillon essentiel de la logique Archipel on se condamne à adopter en fait une forme d'organisation plus classique ( cartel, fédération, simple Réseau ...) et l' on retrouve alors les mêmes problèmes que l'on croyait avoir évités. Rappeler cela n'est pas, je crois, de l'ordre d'un débat philosophique décalé par rapport à la réalité mais une clef essentielle de compréhension des blocages qui viennent aggraver la logique compétitive de l'environnement politique ( maximisée en outre en France par la monarchie républicaine)...