La montée des sentiments d’angoisse et d’impuissance, le spectacle souvent navrant donné par la gestion politique des défis colossaux qui sont devant nous a pour effet d’absolutiser les croyances et, comme le dit Cynthia Fleury, les ressentiments.
Dès lors, l’ensemble social et culturel que l’on a appelé » les créatifs culturels » dans les années 2000, qui ne se reconnait plus dans la société productiviste et cherche à vivre dès maintenant cette rupture, est lui-même profondément fracturé. Or c’est cet ensemble qui permettait jusqu’à présent d’éviter un choc de plus en plus brutal entre « modernistes » et « traditionalistes », les premiers étant tentés par le transhumanisme comme perspective ultime de la fascination technologique et les seconds par une sacralisation de la Terre et du Vivant souvent accompagnés d’une posture quasi misanthropique
( cf. le titre célèbre : l’humanité va disparaître, Bon débarras!).
Dans une telle confrontation le Convivialisme et le Bien Vivre, comme Visions, l’approche archipélique au sens de Glissant comme modalité d’organisation et de coopération ont eu le mérite de donner aux « créatifs culturels » un socle qui leur a permis de commencer à transformer un ensemble sociologique flou en un acteur civique planétaire et capable de rayonner en dépassant les contradictions que nous avons vues dans les forums sociaux mondiaux entre espace et mouvement, entre horizontalité et verticalité.
L’Archipel citoyen Osons les Jours Heureux contribue à ce projet. C’est, en France, un groupe de personnes engagées de la société civique, qui veulent favoriser ce nouveau type de coopération entre organisations, respectueuse de l’histoire et de la culture de chacune pour leur permettre d’agir au long cours afin de construire une société plus écologique, plus démocratique et plus solidaire.
Conscientes que leur diversité est une richesse mais aussi une faiblesse, des associations ont ainsi décidé de se réunir pour concevoir et expérimenter un nouveau modèle de gouvernance avec comme objectif, non pas de construire ni d’imposer une méta structure de plus, mais de soutenir les actions portées par ses membres, et de créer des synergies autour de projets communs pour pallier à la dispersion des moyens et à l’éparpillement des ressources.
Chaque membre est une île de l’archipel, avec ses caractéristiques propres, son identité racine. Elle est en relation avec le monde qui l’entoure (le Tout-Monde écrit Glissant) et en premier lieu les îles proches, ou celles qu’elle a choisies.
L’archipel a donc des objectifs politiques, mais n’entre pas dans l’action politique au sens partidaire ni électoral du terme. L’analyse des crises actuelles qui y est partagée, met l’accent sur le lien très fort entre Transformation personnelle, Transformation collective et Transformation Sociale (TP/TC/TS), concrétisant un changement du rapport au pouvoir.
Ce sont les îles (les membre de l’archipel) qui agissent et, en cultivant les liens qui constituent leur identité-relation. Celles-ci vont sans doute être amenées à réexaminer de temps à autre leur identité-racine et, éventuellement, à la faire évoluer.
L’application de l’intelligence collective pour un « Bien vivre en actes » est l’objectif concret de larchipel.
Osons les jours heureux s’est inspiré de la pensée du poète, écrivain et homme politique martiniquais Edouard Glissant qui a développé la métaphore de l’archipel.